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Le groupe britannique Virgin a remporté un épisode clé dans la bataille des trains sous la Manche: il vient d'obtenir l'accès au très convoité dépôt londonien de Temple Mills, jusqu'ici réservé à l'Eurostar et indispensable pour lancer des liaisons concurrentes entre Londres et le continent.
"Cet accès constitue une première étape essentielle vers l'exploitation de services ferroviaires transfrontaliers via le tunnel sous la Manche" par Virgin, car il lui permettra d'accéder à ces "installations de maintenance légère", a indiqué jeudi le régulateur britannique du rail (ORR).
Plusieurs entreprises ont annoncé leur intention ces derniers mois d'ouvrir des lignes concurrente à l'Eurostar, aujourd'hui seul à effectuer du transport de passagers sur la ligne sous la Manche reliant Londres au continent, et dont les tarifs sont critiqués.
Temple Mills est actuellement le seul dépôt ferroviaire accessible depuis la ligne à grande vitesse HS1 qui relie Londres au tunnel sous la Manche.
L'italien Trenitalia, l'espagnole Evolyn et le britannique Gemini avaient aussi demandé l'accès au dépôt mais voient leur demande refusée, indique jeudi l'ORR, qui dit aussi avoir préféré Virgin aux propositions d'Eurostar d'augmenter sa propre cadence sur les liaisons sous la Manche.
- "Mettre fin à ce monopole" -
Depuis le lancement de la ligne en 1994, plusieurs entreprises ont annoncé leur intention de concurrencer Eurostar, mais aucun de ces projets ne s'est concrétisé.
Les plans de Virgin, groupe du milliardaire Richard Branson, "étaient plus solides financièrement et opérationnellement que ceux des autres candidats", car ils démontraient clairement "le soutien des investisseurs et un accord de principe pour fournir le matériel roulant nécessaire et approprié", affirme l'ORR.
"Il est temps de mettre fin à ce monopole de 30 ans", a pour sa part assuré M. Branson jeudi dans un communiqué de presse. "Nous allons bousculer le modèle transmanche et donner aux consommateurs le choix qu'ils méritent."
Virgin précise avoir confirmé plus tôt cette année un "accord d'exclusivité" avec le constructeur ferroviaire français Alstom "pour l'achat de 12 rames Avelia Stream", et dit investir aux côtés des fonds Equitix et Azzurra Capital.
Virgin Trains prévoit de lancer ses services en 2030, de Londres vers Paris, mais aussi Bruxelles et Amsterdam, avec l'ambition de desservir aussi d'autres destinations en France, en Allemagne ou en Suisse.
Mais le régulateur prévient que le groupe devra encore conclure un accord commercial avec Eurostar, obtenir les financements, l'accès aux voies et aux gares, ainsi que les autorisations de sécurité de l'ORR et des autorités compétentes de l'UE.
La compagnie ferroviaire de Virgin, qui avait opéré au Royaume-Uni entre 1997 et 2019, avait annoncé en début d'année son intention de lever pour ses nouveaux projets transmanches 300 millions en fonds propres et 400 millions d'emprunts.
- Guerre des prix -
Les usagers espèrent que l'ouverture à la concurrence engendrera une guerre des prix, les billets de train étant souvent bien plus chers que ceux de l'avion sur le Paris-Londres, malgré des premiers tarifs à 39 livres (ou 44 euros).
Eurotunnel, la société qui gère le tunnel sous la Manche, cherche à attirer de nouveaux opérateurs, estimant que l'infrastructure est en mesure d'accueillir jusqu'à 1.000 trains par jour, contre 400 actuellement (entre Eurostar, Shuttle et fret).
Le groupe britannique London St. Pancras Highspeed, qui exploite la ligne à grande vitesse reliant Londres au tunnel sous la Manche, estime lui aussi qu'elle ne fonctionne qu'à 50% de sa capacité.
Eurostar "prend acte" jeudi de la décision de l'ORR, selon une réaction transmise à l'AFP. L'opérateur, qui avait précédemment insisté sur le fait que le dépôt de Temple Mills est déjà "presque plein", dit réfléchir "aux mesures à prendre pour assurer la poursuite de (sa) croissance".
Le groupe a annoncé la semaine dernière avoir choisi l'industriel français Alstom pour construire 50 nouveaux trains, dont 20 en option, soit un investissement de 2 milliards d'euros.
Un nombre record de 19,5 millions de clients ont voyagé avec Eurostar en 2024, soit 850.000 de plus qu'en 2023, a indiqué la compagnie en janvier.
D.Dvorak--TPP