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Le maire de Saint-Etienne, Gaël Perdriau, a été reconnu coupable lundi de chantage à la sextape et condamné à quatre ans de prison ferme et une inéligibilité immédiate, une peine plus sévère que celle requise lors de son procès.
"Je suis innocent, cette décision est totalement incompréhensible", a-t-il déclaré à la sortie du tribunal correctionnel de Lyon, en annonçant qu'il ferait appel.
L'édile de 53 ans, ex-LR, a été jugé fin septembre dans cette affaire de piège tendu à un rival, l'ex-premier adjoint Gilles Artigues, filmé à la caméra cachée en compagnie d'un prostitué, puis contraint à faire profil bas.
Soulignant "le devoir d'exemplarité", "de dignité" et "de représentation" des élus, elle a déclaré le maire "entièrement coupable" de chantage, association de malfaiteurs et détournement de fonds publics et a prononcé des peines allant au-delà des trois ans ferme requis par le ministère public.
Gaël Perdriau a été condamné à cinq ans de prison, dont quatre ans ferme, avec mandat de dépôt à effet différé, assorti de l'exécution provisoire, autrement dit il sera bientôt incarcéré, et à cinq ans d'inéligibilité avec application immédiate, ce qui lui impose de quitter tout de suite la mairie.
A l'annonce du jugement, M. Perdriau est resté impassible, et quelques applaudissements ont retenti dans la salle. Pendant l'enquête et lors de son procès, il avait martelé n'avoir joué aucun rôle dans le complot ourdi contre Gilles Artigues.
Cet ancien député centriste, qui avait révélé lors du procès ses pensées suicidaires, s'est félicité lundi de la décision. "Aujourd'hui je pense que je vais pouvoir me reconstruire", a-t-il dit, entouré de sa famille.
-"Les juges ont compris"-
Si Gaël Perdriau a toujours nié avoir participé à un chantage pour le museler, plusieurs membres de son entourage ont assumé leur rôle dans le piège et ont également été condamnés à de peines lourdes.
Pierre Gauttieri, qui fut pendant dix ans directeur de cabinet du maire et n'était pas présent à l'audience de délibéré, a été condamné à quatre ans de prison, dont deux avec sursis.
Lors de l'instruction, et à la barre, il a assuré que M. Perdriau lui avait demandé, dès son élection en 2014, "une solution pour tenir en respect Gilles Artigues", dont il doutait de la loyauté.
L'idée de piéger avec un escort-boy ce catholique opposé au mariage entre personnes de même sexe a germé lors d'échanges avec l'ambitieux adjoint à l'Education Samy Kéfi-Jérôme et le conjoint de ce dernier Gilles Rossary-Lenglet.
Pour le premier, qui avait servi d'appât et avait posé la caméra cachée, le tribunal a retenu une peine de quatre ans de prison dont un avec sursis.
La même peine a été prononcée contre Gilles Rossary-Lenglet, qui a reconnu avoir eu l'idée de piéger Gilles Artigues sur le plan des moeurs, avoir réservé l'escort-boy et monté les rushs de la vidéo intime.
Ce personnage atypique, qui de son propre aveu "grenouillait" dans le milieu politique stéphanois, est l'homme par lequel le scandale est arrivé: c'est lui qui, séparé, au chômage, et malade, est allé voir Médiapart avec la "sextape" en 2022.
"Les juges ont compris et ont puni, c'est une bonne chose", a-t-il commenté lundi en se félicitant que le tribunal n'ait pas hésité à condamner un homme politique.
Lors du procès, fin septembre, deux couples à la tête d'associations stéphanoises avaient comparu à leurs côtés pour "abus de confiance", soupçonnés d'avoir joué un rôle dans le financement du piège.
Sans être au courant de l'existence de la vidéo, ils étaient accusés d'avoir perçu des subventions municipales, attribuées sur la réserve du maire, et de les avoir reversées à Gilles Rossary-Lenglet. Le tribunal les a relaxés, estimant ne pas avoir discerné d"intentions frauduleuses" de leur part.
G.Kucera--TPP