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Le candidat nationaliste Karol Nawrocki arrive en tête de l'élection présidentielle en Pologne de dimanche selon une nouvelle estimation, soit un revers majeur pour le gouvernement pro-UE du pays si la tendance se confirme.
Karol Nawrocki, 42 ans, un historien nationaliste spécialiste du monde criminel et admirateur du président américain Donald Trump, est crédité de 51% des voix, selon cette estimation de l'Institut Ipsos, basée sur des résultats issus de 90% des bureaux de vote.
Son rival de 53 ans, Rafal Trzaskowski, maire pro-UE de Varsovie et allié du gouvernement centriste du pays, était à 49%.
Les résultats officiels définitifs sont attendus lundi dans la matinée.
Si ces prévisions se confirment, la victoire de Karol Nawrocki risque de bloquer le programme progressiste du gouvernement concernant notamment l'avortement et les droits LGBT+ et pourrait raviver les tensions avec Bruxelles sur les questions d'Etat de droit.
Cela pourrait aussi compromettre les liens étroits avec l'Ukraine voisine car M. Nawrocki critique les plans d'adhésion de l'Ukraine à l'UE et à l'Otan et souhaite réduire les avantages pour les réfugiés ukrainiens.
Karol Nawrocki a visité la Maison Blanche pendant sa campagne et a affirmé que Donald Trump lui avait dit: "Tu vas gagner".
La secrétaire américaine à la Sécurité intérieure, Kristi Noem, a également soutenu M. Nawrocki lors de sa participation à une réunion de la sphère conservatrice en Pologne la semaine dernière, déclarant: "Il doit être le prochain président".
La première estimation donnait gagnant le maire pro-UE de Varsovie, Rafal Trzaskowski, d'une courte tête, à 50,3% des suffrages. C'était avant de nouvelles estimations favorables à son adversaire. Les deux candidats ont revendiqué la victoire.
"Nous ne permettrons pas que (le Premier ministre) Donald Tusk ait (...) le monopole du pouvoir."
"Une nuit blanche nous attend", a déclaré à l'AFP Dorota Loboda, une députée de la Coalition civique au pouvoir, ajoutant qu'elle passerait la nuit à vérifier les résultats de la commission électorale.
- "Valeurs catholiques" -
Les présidents polonais exercent une certaine influence sur la politique étrangère et de défense de leur pays. Ils disposent surtout d'un pouvoir de veto au niveau législatif, qui ne peut être annulé que par une majorité des trois cinquièmes au Parlement - ce dont ne dispose pas le gouvernement en place.
Les réformes prévues par le Premier ministre Donald Tusk, ancien président du Conseil européen arrivé au pouvoir en 2023, ont été bloquées en raison de l'impasse avec l'actuel président nationaliste en exercice Andrzej Duda.
De nombreux partisans de M. Nawrocki souhaitent davantage de restrictions en matière d'immigration et une souveraineté accrue de leur pays au sein de l'Union européenne.
"Les valeurs catholiques sont importantes pour moi. Je sais qu'il les partage," a déclaré à l'AFP Lila Chojecka, une retraitée de Varsovie, votant pour M. Nawrocki.
Les électeurs de Rafal Trzaskowski soutiennent plutôt une intégration accrue au sein de l'UE et une accélération des réformes sociales.
Le maire de Varsovie prône l'introduction des partenariats civils, y compris pour les couples de même sexe, et l'assouplissement de l'interdiction quasi totale de l'avortement en Pologne.
Malgorzata Wojciechowska, guide touristique et enseignante d'une cinquantaine d'années, a souligné que les Polonaises "n'ont malheureusement pas les mêmes droits que nos amies européennes".
"J'espère que Rafal Trzaskowski relancera le débat sur l'avortement pour que nous puissions enfin vivre dans un pays libre," a-t-elle déclaré à l'AFP.
Anna Materska-Sosnowska, analyste politique, a qualifié l'élection de "véritable choc de civilisations" en raison des importantes divergences de politiques entre les candidats.
- Controverses de campagne -
Une victoire de Karol Nawrocki renforcerait le parti populiste Droit et Justice (PiS) qui a gouverné la Pologne entre 2015 et 2023, et pourrait entraîner de nouvelles élections législatives.
La campagne de M. Nawrocki a souvent été éclipsée par des controverses concernant les circonstances dans lesquelles il a acquis un appartement auprès d'un homme âgé et son passé de hooligan.
L'ancien boxeur amateur a nié catégoriquement les informations des médias, parues dans les derniers jours de la campagne, selon lesquelles il aurait recruté des travailleuses du sexe lorsqu'il exerçait en tant que garde dans un hôtel.
Son opposition à l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan a suscité des critiques de la part de responsables ukrainiens.
Karol Nawrocki a utilisé ses dernières heures de campagne vendredi pour déposer des fleurs au pied d'un monument dédié aux Polonais tués par des nationalistes ukrainiens pendant la Seconde Guerre mondiale.
"C'était un génocide commis contre le peuple polonais", a-t-il déclaré.
La Pologne, pays de 38 millions d'habitants, est membre de l'UE et de l'Otan, avec une économie en croissance rapide, jouant un rôle de premier plan dans la diplomatie internationale autour de l'Ukraine. La majorité des armes occidentales et de l'aide destinées à Kiev transitent par son territoire.
S.Janousek--TPP