The Prague Post - "Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie

EUR -
AED 4.234174
AFN 81.122166
ALL 97.629526
AMD 443.04022
ANG 2.063274
AOA 1057.218615
ARS 1362.027416
AUD 1.77131
AWG 2.07812
AZN 1.961543
BAM 1.948406
BBD 2.32697
BDT 140.945156
BGN 1.955914
BHD 0.434847
BIF 3431.578203
BMD 1.15291
BND 1.476298
BOB 7.99267
BRL 6.321639
BSD 1.152427
BTN 99.341031
BWP 15.407533
BYN 3.771588
BYR 22597.037105
BZD 2.314916
CAD 1.566857
CDF 3316.922004
CHF 0.939734
CLF 0.028177
CLP 1081.279866
CNY 8.277606
CNH 8.285394
COP 4730.770422
CRC 580.397567
CUC 1.15291
CUP 30.552116
CVE 109.849109
CZK 24.809464
DJF 205.221248
DKK 7.458325
DOP 68.141424
DZD 149.793015
EGP 57.852104
ERN 17.293651
ETB 154.761925
FJD 2.587941
FKP 0.84787
GBP 0.852836
GEL 3.14168
GGP 0.84787
GHS 11.869957
GIP 0.84787
GMD 82.433676
GNF 9985.109541
GTQ 8.851412
GYD 241.025382
HKD 9.05009
HNL 30.091811
HRK 7.537841
HTG 150.827655
HUF 403.634175
IDR 18793.240956
ILS 4.048651
IMP 0.84787
INR 99.531308
IQD 1509.770878
IRR 48549.042436
ISK 143.59515
JEP 0.84787
JMD 183.423962
JOD 0.817439
JPY 167.319566
KES 148.954916
KGS 100.822068
KHR 4615.485633
KMF 490.568169
KPW 1037.624973
KRW 1579.988257
KWD 0.353148
KYD 0.960455
KZT 597.931033
LAK 24863.649997
LBP 103260.756778
LKR 346.60474
LRD 230.49534
LSL 20.557789
LTL 3.404243
LVL 0.697384
LYD 6.253271
MAD 10.50145
MDL 19.684304
MGA 5175.361076
MKD 61.534736
MMK 2419.903836
MNT 4130.262797
MOP 9.318261
MRU 45.498348
MUR 52.353512
MVR 17.760548
MWK 1998.416616
MXN 21.874117
MYR 4.894682
MZN 73.728739
NAD 20.557789
NGN 1783.447923
NIO 42.40907
NOK 11.41536
NPR 158.945849
NZD 1.905518
OMR 0.443259
PAB 1.152427
PEN 4.152343
PGK 4.744994
PHP 65.591366
PKR 326.550739
PLN 4.275048
PYG 9206.065775
QAR 4.203648
RON 5.033028
RSD 117.22775
RUB 90.599741
RWF 1664.184923
SAR 4.325596
SBD 9.623791
SCR 16.34008
SDG 692.31904
SEK 10.951712
SGD 1.479385
SHP 0.906006
SLE 25.623434
SLL 24175.951652
SOS 658.60081
SRD 44.79002
STD 23862.910451
SVC 10.083735
SYP 14990.017548
SZL 20.553008
THB 37.576224
TJS 11.415183
TMT 4.035185
TND 3.406175
TOP 2.700231
TRY 45.446328
TTD 7.824309
TWD 34.130176
TZS 2990.858572
UAH 47.885504
UGX 4143.27752
USD 1.15291
UYU 47.350729
UZS 14653.394815
VES 117.789336
VND 30069.623635
VUV 138.250391
WST 3.172554
XAF 653.477252
XAG 0.031009
XAU 0.00034
XCD 3.115797
XDR 0.815408
XOF 653.482899
XPF 119.331742
YER 280.099376
ZAR 20.660552
ZMK 10377.572927
ZMW 28.056534
ZWL 371.236568
  • AEX

    -4.2500

    920.63

    -0.46%

  • BEL20

    -43.0200

    4438.57

    -0.96%

  • PX1

    -58.8400

    7683.73

    -0.76%

  • ISEQ

    -213.7400

    11339.8

    -1.85%

  • OSEBX

    3.2700

    1636.76

    +0.2%

  • PSI20

    -98.8500

    7447.3

    -1.31%

  • ENTEC

    -5.8300

    1416.23

    -0.41%

  • BIOTK

    -52.1200

    2477.99

    -2.06%

  • N150

    -17.3300

    3592.79

    -0.48%

"Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie
"Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie / Photo: ELVIS BARUKCIC - AFP

"Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie

Si Zehra Murguz a fini par témoigner des violences sexuelles dont elle a été victime pendant la guerre en Bosnie, c'est "aussi au nom de toutes les autres, au nom de cette fille de 12 ans qui ne parlera jamais", parce qu'elle "n'a jamais été retrouvée".

Taille du texte:

A l'été 1992, l'horreur débute chez elle quand les forces serbes prennent la ville montagnarde de Foca, dans le sud-est de la Bosnie. Elle se poursuit au gymnase "Partizan" qui deviendra un lugubre centre de détention. C'est là qu'elle voit cette enfant arriver, "avec une poupée entre les mains", raconte-t-elle. Personne ne sait ce qu'elle est devenue.

Des dizaines de femmes musulmanes, des filles aussi, subiront sévices et viols collectifs, réduites pour certaines à l'état d'esclaves sexuelles des mois durant, quand d'autres seront vendues ou tuées.

L'ampleur des crimes de guerre dans cette partie de la Yougoslavie en plein démembrement est sans précédent dans l'Europe post-1945: au moins 20.000 victimes de violences sexuelles, la plupart Bosniaques, mais aussi des Serbes et des Croates.

Dès 1993, le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) est créé. Il devient le premier en Europe à reconnaître le viol comme constitutif de crime contre l'humanité, dans un verdict historique en 2001 qui concerne Foca et trois enfants de la ville devenus officiers de l'armée des Serbes de Bosnie.

Aujourd'hui, dans une Bosnie où seuls des juges bosniens statuent depuis une dizaine d'années, si une poignée de survivantes mues par une soif de paix recueille et fournit à la police des milliers de témoignages, beaucoup restent murées dans le silence.

- Agonie -

La machine judiciaire s'enclenche pour Zehra Murguz en 2011 quand à son retour en Bosnie, après des années au Monténégro, en Serbie et Croatie, elle se fixe comme mission de "traduire en justice le criminel" - son ex-voisin.

"Si je ne parle pas, ce sera comme si le crime n'avait pas eu lieu", se dit-elle. Localisé à Foca "où il ne se cachait pas", l'homme est arrêté et comparaît devant un tribunal local en 2012.

"C'était comme revenir en 1992", à l'"agonie" d'alors. La condamnation permet de le marquer du "sceau de son vrai nom: criminel de guerre", dit-elle depuis un local de couture à Sarajevo occupé par l'association "des victimes de la guerre Foca 1992-1995".

Autour d'elle, d'autres survivantes tissent, une forme de thérapie collective.

"A ce jour, seuls 18 verdicts ont été prononcés pour des crimes de violences sexuelles commis à Foca. Trois procès sont en cours. Beaucoup de temps s'est écoulé et les témoins sont épuisés", explique Midheta Kaloper, 52 ans, présidente de l'association. Elle a été victime à Goražde (est de la Bosnie) d'"un crime inexplicable, irracontable", la "pire torture qu'une fille puisse subir", et espère encore que le suspect sera jugé en Bosnie, et non en Serbie où il réside.

Elle note une "stagnation" depuis cinq ans, alors que 258 dossiers de crimes de guerre impliquant 2.046 suspects doivent encore être jugés par la justice bosnienne, selon les chiffres du Haut conseil des magistrats.

Au total, fin 2024, la justice de Bosnie-Herzégovine avait jugé 773 affaires de crimes de guerre, dont plus d'un quart impliquent des violences sexuelles, selon la mission de suivi de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui note "un retard important", notamment dans les centaines de dossiers où le suspect n'a pas encore été identifié.

"Ce qui nous tue le plus, c'est la longueur excessive de ces procédures", lâche Mme Kaloper.

- Bombe à retardement -

"Nous nous battons depuis 30 ans et notre seul véritable succès est d'avoir obtenu la loi sur les victimes civiles de guerre", déplore-t-elle.

Le texte prévoit notamment une pension mensuelle allant de 175 à 350 euros selon les territoires. Mais il ne concerne que l'entité croato-musulmane (Fédération de Bosnie-Herzégovine) et les personnes qui y vivent, et n'est pas harmonisé au niveau de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine, pays de quelque 3 millions d'habitants qui englobe Fédération de Bosnie-Herzégovine, Republika Srpska (RS, entité serbe) et district de Brcko (territoire autonome), où s'appliquent différentes législations, jurisprudences et pratiques.

Un millier de survivants ont obtenu ce statut de victime civile de guerre dans la Fédération, une centaine en RS et à Brcko, relève Ajna Mahmic, coordinatrice juridique pour l'ONG suisse Trial International.

Le viol, explique-t-elle, "est généralement lié à la stigmatisation, à la pureté du corps et de l'âme". "En tant que société, nous continuons à rejeter la responsabilité et la honte sur les victimes plutôt que sur les auteurs", dit-elle, ajoutant que "de nombreuses survivantes ne se sentent pas en sécurité, certains de leurs agresseurs travaillant dans des institutions publiques".

Sans parler de la glorification "des criminels de guerre et la minimisation des souffrances que nous avons subies", abonde Mme Kaloper. Ni de l'absence des accusés basés à l'étranger, qui constitue un "obstacle majeur" à la clôture de près de la moitié des affaires en cours, relève l'OSCE dans un rapport publié en janvier.

Autre "tendance préoccupante", selon l'OSCE: "l'échec généralisé des tribunaux à accorder une indemnisation aux victimes" au pénal. Quant aux compensations au civil, alors qu'au TPIY de La Haye (Pays-Bas) les témoins ont parlé sous couvert d'anonymat, en Bosnie aucune mesure de protection de leur identité n'est prévue au civil.

"Aujourd'hui encore, il est très difficile pour les victimes de parler", résume Bakira Hasecic, 71 ans, présidente de l'association des Femmes victimes de la guerre, et les filles d'alors gardent caché "le poids de cette tragédie dans leur cœur", épiant en silence leur bourreau présumé sur les réseaux sociaux.

"C'est une bombe à retardement qui peut exploser à tout moment et pousse certaines à nous appeler", dit-elle.

Ces derniers mois, 15 d'entre elles ont franchi le cap.

X.Kadlec--TPP