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Les sites de vente de liquide pour cigarettes électroniques comme Le Petit Vapoteur, qui est l'un des principaux en Europe, craignent de mettre la clé sous la porte si la mesure d'interdiction de vente en ligne prévue par le gouvernement français est adoptée dans le budget 2026.
"S'il décide de nous priver de 70% de nos ventes, c'est la cessation de notre activité et 600 emplois pourraient disparaître", redoute Morgan Laisné du site Le Petit Vapoteur, basé en Normandie et qui a réalisé en France 95% des 154 millions d'euros de son chiffre d'affaires en 2024.
Le projet de budget du gouvernement prévoit une taxe de 30 à 50 centimes par flacon de 10 millilitres (ml), vendu généralement entre 5 et 7 euros.
Cette taxe hérisse les professionnels, mais beaucoup moins que les mesures qui l'accompagnent.
Car dans son projet de budget, le gouvernement envisage également de soumettre les boutiques de vapotage à l'obtention d'un agrément similaire à celui des buralistes, interdisant par exemple la proximité avec des écoles.
Surtout, la vente à distance aux particuliers, à l'origine d'un bon quart des ventes dans la filière selon les professionnels, sera entièrement interdite.
"On avait vu venir la taxe" déjà envisagée par l'ex-Premier ministre François Bayrou, mais "ces autres mesures, ça a été un choc", s'alarme auprès de l'AFP Morgan Laisné.
- 3.000 emplois menacés -
Pour Le Petit Vapoteur, même ses 111 magasins physiques ouverts en France, où ont lieu un tiers des ventes de la société, sont menacés, car ils sont "très dépendants de l'activité en ligne", selon Morgan Laisné.
Tout comme la ligne de production de liquides de vapotage installée à Cherbourg (Manche) par l'entreprise, "qui sera surdimensionnée sans la vente en ligne."
Interrogée par l'AFP, la Fivape, fédération du secteur, estime que 3.000 emplois dans la vente en ligne "disparaîtraient instantanément".
Elle a lancé une pétition auprès des usagers, qui a déjà récolté 120.000 signataires - dont l'unicité n'est vérifiée que par le biais de leur adresse e-mail.
Plus qu'une mesure de santé publique, les professionnels estiment que l'interdiction de la vente en ligne a été pensée avant tout pour simplifier la collecte de la taxe.
Pour Morgan Laisné, "les douanes ont voulu répliquer le système des buralistes et de la taxe sur le tabac. Et comme en ligne, on ne sait pas trop ce que c'est, on l'interdit."
Ce que Bercy conteste. "Ce sont des mesures de santé publique, qui convergent avec les règles applicables au tabac", a indiqué à l'AFP le cabinet de la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin.
Pour le cabinet de la ministre de la Santé, Stéphanie Rist, "la mesure cherche à réduire l'exposition et l'accessibilité des produits de vapotage, surtout chez les jeunes, tout en renforçant la sécurité sanitaire et la traçabilité", notamment pour éviter les produits "non conformes", a-t-il indiqué à l'AFP.
- Les produits sans nicotine taxés aussi -
Morgan Laisné estime, lui, que ces mesures seraient "une catastrophe pour la santé publique", assurant que le vapotage a contribué aux 4 millions de fumeurs quotidiens en moins depuis 10 ans, un chiffre publié mi-octobre par Santé publique France.
Le Comité national contre le tabagisme (CNCT) n'est pas d'accord.
"Ces produits rendent très dépendants, leur marketing cible particulièrement les jeunes", estime Emmanuelle Béguinot, directrice de l'association antitabac, qui juge "important un meilleur contrôle via l'interdiction de tout ce qui touche à la vente en ligne."
Le projet de budget prévoit de taxer à 30 centimes d'euros les flacons de 10 ml de produit qui contiennent moins de 15 mg/ml de nicotine, y compris ceux qui n'en contiennent pas du tout, "des produits qui font que vous mettez le pied à l'étrier," selon Emmanuelle Béguinot.
Pour les produits avec plus de 15 mg/ml de nicotine, la taxe est portée à 50 centimes d'euros le flacon de 10 ml.
Un amendement de députés LR supprimant la taxe mais pas l'interdiction de la vente en ligne a été adopté mercredi en commission des Finances.
Cette modification ne présage rien du texte final, puisque l'hémycicle examinera à partir de vendredi le projet de budget dans sa copie originale.
En séance plénière, l'Assemblée nationale pourra éventuellement adopter ou non d'autres amendements, comme ceux proposés par des députés LFI, UDR et même du camp macroniste qui suppriment l'interdiction de vente en ligne.
W.Urban--TPP