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Première femme et première Africaine à la tête du Comité international olympique (CIO), la Zimbabwéenne Kirsty Coventry succède lundi à l'Allemand Thomas Bach au poste le plus prestigieux et teinté de politique du sport mondial.
A seulement 41 ans, la dixième présidente du CIO entame un mandat de huit ans - avec une possible reconduction pour quatre ans - et prévoit de consulter mardi et mercredi la centaine de membres de l'instance pour établir "une nouvelle feuille de route".
"Lorsque j'étais une fillette de neuf ans, jamais je n'aurais imaginé que je serais ici devant vous, avec la possibilité de redonner à notre incroyable mouvement (ce qu'il m'a apporté)", avait déclaré en mars la septuple médaillée olympique de natation, après avoir supplanté ses six adversaires dès le premier tour de scrutin.
Entrée à la commission des athlètes en 2013, l'ex-ministre des Sports du Zimbabwe est un puissant symbole de la mutation du CIO, club d'aristocrates et de dirigeants occidentaux qui s'est nettement internationalisé et féminisé sous la houlette de Thomas Bach.
"Nous avons une athlète à la tête de l'organisation. C'est une bonne chose", avait d'ailleurs salué le Britannique Sebastian Coe, l'un de ses rivaux malheureux, tant Coventry incarne la montée en puissance politique des anciens champions.
- Tests de féminité -
Sa présidence pourrait être celle "d'une énorme réforme" du soutien financier aux athlètes, "pas seulement aux +Olympiens+ mais à ceux qui veulent le devenir", estime Jean-Loup Chappelet, spécialiste de l'olympisme à l'Université de Lausanne.
Dans l'immédiat, la transition programmée lundi à la mi-journée à Lausanne s'annonce chaleureuse, tant Thomas Bach passe pour avoir poussé en coulisses l'ex-championne et l'associe depuis mars à toutes ses réunions.
"Si le futur président souhaite avoir des conseils ou du soutien, il peut m'appeler au milieu de la nuit", promettait le Bavarois de 71 ans avant le scrutin. "Sinon, je n'imposerai pas mon avis."
Après douze ans de règne, l'ancien champion olympique de fleuret laisse une maison prospère: les futurs pays organisateurs des Jeux olympiques ont été désignés jusqu'en 2034 et l'accord de diffusion avec la chaîne américaine NBC Universal a été sécurisé jusqu'en 2036.
Kirsty Coventry devra néanmoins imposer rapidement sa propre marque, elle qui a mené une campagne discrète - pendant laquelle elle a limité ses déplacements et accouché de sa deuxième fille -, sans avancer de propositions concrètes.
Sa position sera particulièrement scrutée sur la réémergence des tests chromosomiques de genre pour accéder aux compétitions féminines, sous l'impulsion de World Athletics, la fédération international d'athlétisme, en mars puis de la jeune World Boxing, fin mai.
- Amadouer Trump -
Pressée de questions sur ce sujet en mars, Coventry avait promis de "protéger les athlètes féminines", mais sans s'avancer sur l'admission ou l'exclusion des athlètes transgenres ou intersexes: elle voulait un "groupe de travail" pour aboutir à une "décision commune", et se voit déjà prise de vitesse par plusieurs disciplines.
A un peu plus de six mois des Jeux d'hiver de Milan-Cortina (6-22 février 2026), il faudra aussi que la nouvelle présidente décide du sort des athlètes russes et bélarusses. A moins d'une paix durable en Ukraine, une participation limitée aux épreuves individuelles, sous drapeau neutre et strictes conditions, comme aux JO-2024 de Paris, semble la piste la plus probable.
Diplomatiquement, Kirsty Coventry devra également nouer une relation avec le président américain Donald Trump, hôte des Jeux d'été de 2028 à Los Angeles.
"Depuis l'âge de 20 ans, j'ai été confrontée, disons, à des hommes difficiles occupant de hautes fonctions", avait plaisanté l'ancienne nageuse en mars. "Ce que j'ai appris, c'est que la communication sera la clé, et c'est quelque chose qui doit se produire tôt".
Outre son action attendue sur le modèle économique du CIO et son impact climatique - des sujets existentiels pour l'olympisme -, l'instance olympique devra aussi attribuer les JO d'été de 2036, pour lesquels les "parties intéressées" se bousculent, de l'Inde à l'Afrique du Sud en passant par la Turquie, la Hongrie, le Qatar ou l'Arabie saoudite.
R.Krejci--TPP