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Emmanuel Macron s'est résolu à descendre dans l'arène. Les chefs des forces politiques sont arrivés vendredi à l'Elysée pour une réunion convoquée en urgence par le président de la République, au pied du mur pour désigner un Premier ministre face aux vetos croisés.
Aucun d'entre eux, ni les dirigeants de la droite et du centre arrivés séparément ni ceux de la gauche arrivés groupés dans la cour d'honneur du palais présidentiel, devant les caméras, n'ont fait de déclaration, alors que l'hypothèse d'une reconduction de Sébastien Lecornu quatre jours après sa démission suscite l'irritation jusque dans le camp du chef de l'Etat.
Les téléphones ont bipé autour de 02H00 du matin: Emmanuel Macron a invité les chefs de parti et chefs de groupe à l'Assemblée nationale, sauf le Rassemblement national et La France insoumise, à 14H30 à l'Elysée.
Cette réunion doit être "un moment de responsabilité collective", s'est borné à commenter laconiquement la présidence plusieurs heures plus tard, semblant dramatiser ce rendez-vous et faire planer la menace d'une dissolution.
Le président n'a pas pris la parole depuis la démission fracassante de Sébastien Lecornu. Une prochaine expression est cependant évoquée par ses proches.
Le chef de l'Etat a promis de nommer un Premier ministre d'ici vendredi soir, après deux jours de négociations supplémentaires pour tenter d'arracher, en l'absence de toute majorité à l'Assemblée, un accord de non-censure du futur gouvernement.
Le scénario qui revenait le plus en force était la reconduction du Premier ministre démissionnaire, un fidèle macroniste qui a pris la lumière depuis son arrivée à Matignon.
"Je ne comprendrais pas qu'il y ait une renomination d'un Premier ministre macroniste", a toutefois prévenu Agnès Pannier-Runacher, macroniste de la première heure, résumant un état d'esprit répandu dans le camp présidentiel. Le chef du parti présidentiel Renaissance, Gabriel Attal, a lui demandé à nouveau à Emmanuel Macron de "partager le pouvoir".
- "Fable" -
Si le nom de Jean-Louis Borloo a beaucoup circulé ces dernières heures, il semble peu probable que ce soit le choix final du président.
Au bal des paris, d'autres noms continuaient aussi à être cités, de l'ex-Premier ministre socialiste, Bernard Cazeneuve, au premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, lui aussi issu du PS.
Avec un double défi pour le chef de l'État: repousser le plus tard possible la menace d'une censure et a fortiori d'une dissolution.
En revanche, le scénario d'un Premier ministre de gauche s'éloignait, malgré l'appel à nouveau jeudi soir des chefs de partis socialiste, communiste et écologiste, à "entendre le pays". "La fable d'un Premier ministre de gauche n'a aucune réalité aujourd'hui", a moqué vendredi Manuel Bompard (LFI).
La gauche hors LFI a prévu de se concerter avant de se rendre à l'Elysée.
- Projet de budget prêt -
En attendant, l'urgence est de déposer un projet de budget en début de semaine pour que le Parlement dispose bien de 70 jours pour l'examiner, comme le prévoit la Constitution.
Mais, a précisé Pierre Moscovici sur RMC-BFMTV, ce projet devra bien être celui qui a été envoyé le 2 octobre au Haut conseil des finances publiques, qui l'a "déjà examiné" et a préparé son avis. Il s'agit donc du texte qui a été le détonateur de la crise actuelle avec le vote de défiance de l'Assemblée nationale qui a provoqué la chute de François Bayrou le 8 septembre.
"Qui peut imaginer qu'en 48 heures, on peut tout refaire?", a interrogé Pierre Moscovici.
Ce projet de budget "ne sera pas parfait", avait reconnu le Premier ministre démissionnaire mercredi à l'issue de ses multiples rencontres avec les partis, et devra être débattu.
La France aura-t-elle un gouvernement dès vendredi ou à défaut ce weekend? Les principaux ministres en place seront-ils reconduits? Remplacés par des ministres techniques?
Le Premier ministre démissionnaire souhaite que la future équipe gouvernementale soit "complètement déconnectée des ambitions présidentielles pour 2027", des ambitions qu'il n'a lui-même jamais manifestées.
Le président des Républicains, Bruno Retailleau, qui a précipité la chute du gouvernement Lecornu, a indiqué vendredi qu'il ne resterait pas au ministère de l'Intérieur. La veille, il était déjà monté au créneau, refusant la nomination d'un Premier ministre "de gauche" ou "macroniste".
Emmanuel Macron est aussi très attendu sur une éventuelle suspension de la très controversée réforme des retraites de 2023, préalable posé par les socialistes pour un accord de non-censure.
M.Soucek--TPP