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"Ras-le-bol" de "l'austérité" : les premiers cortèges s'élancent jeudi en France dans le cadre d'une nouvelle journée de mobilisation visant à peser sur les choix budgétaires du nouveau Premier ministre.
"J'ai fait partie des premiers gilets jaunes, rien n'a changé, c'est de pire en pire même", déclare à l'AFP Bruno Cavelier, 64 ans, à Lyon. "Chaque jour les plus riches s'enrichissent, les pauvres s'appauvrissent."
"Mes grand-parents et mes parents se sont battus pour la sécurité sociale et les congés payés, je reprends le combat pour mes enfants et ma petite fille", ajoute ce plombier chauffagiste à la retraite, qui arbore une pancarte "souriez, vous êtes taxés".
Depuis l'aube, près de 400 actions ont été recensées réunissant près de 20.000 manifestants sur l'ensemble du territoire, selon la gendarmerie et la police, cette dernière faisant état de plus de 70 interpellations, d'une centaine de blocages en cours et de 26 gardes à vue.
Les actions ont été à ce stade "moins intenses que prévu", a affirmé jeudi midi le ministre démissionnaire de l'Intérieur Bruno Retailleau alors que 80.000 policiers et gendarmes, appuyés notamment par des drones et des canons à eau, sont mobilisés.
A Paris, au moins 300 lycéens ont bloqué le lycée Maurice-Ravel, en brandissant des pancartes "Bloque ton lycée contre l'austérité".
A Paris toujours, l'université de Tolbiac a fermé son campus à la suite "d'actions violentes à l'encontre des personnels et à un blocage des issues du bâtiment".
Près de 17,06% des enseignants étaient grévistes, a décompté le ministère de l'Education. Selon le Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, 45% des personnels de collèges et lycées sont grévistes.
En Martinique, une tentative de "sabotage" sur un réseau d'eau a été déjouée, selon Bruno Retailleau.
Dans le Nord, un dépôt de bus a été bloqué quelques heures près de Lille.
"On en a marre, on en a ras-le-bol d'être taxés à gogo" et d'avoir "des difficultés à finir nos fins de mois" dès "le 15 du mois", explique Samuel Gaillard, 58 ans, un chauffeur de camion-poubelles et syndicaliste CGT.
De manière générale, "on a certes une situation perturbée" sur les transports "mais elle n'est pas bloquée", a déclaré le ministre des Transports démissionnaire Philippe Tabarot.
Les expéditions de carburants sont, elles, "bloquées" selon la CGT dans des raffineries du Rhône et de Seine-Maritime. TotalEnergies évoque une mobilisation "très faible" sans "impact" sur ses activités.
- Drones et canons à eau -
Jusqu'à 900.000 manifestants sont attendus par les autorités, une affluence qui dépasserait largement la mobilisation, moins structurée, du 10 septembre (près de 200.000 personnes d'après le décompte officiel) et égalerait celle des journées d'action contre la réforme des retraites en 2023.
Les premiers cortèges sont partis en milieu de matinée notamment à Montpellier, Marseille ou encore Saint-Malo. A La Réunion, 2.500 personnes ont manifesté, selon la préfecture.
A Paris, le cortège s'élancera, avec les neuf leaders syndicaux et plusieurs responsables de gauche, à 14H00 de la place de la Bastille vers la place de la Nation.
Les pharmaciens se mobilisent aussi pour dénoncer la réduction des remises commerciales sur les médicaments génériques. Selon le syndicat de pharmaciens FSPF, environ 18.000 pharmacies sont fermées sur 20.000.
- Front commun -
Les signaux d'apaisement qu'a tenté d'envoyer le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu en abandonnant l'impopulaire suppression de deux jours fériés et en supprimant les "avantages à vie" des anciens Premiers ministres, n'ont pas essoufflé la mobilisation.
Refus d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage et du gel des prestations sociales, demande de moyens pour les services publics et de justice fiscale... Les revendications sont nombreuses et les crispations sur la très controversée réforme des retraites, adoptée sans vote en 2023, persistent.
Comme aux grandes heures de la mobilisation de 2023, CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires font front commun pour dénoncer les mesures d'économie annoncées par François Bayrou en juillet.
Pourtant, des divergences apparaissent déjà dans ce front, depuis la réception des syndicats à Matignon ces derniers jours. La CGT en est sortie en dénonçant une rupture de façade avec les choix de François Bayrou.
La CFDT a reconnu certains signaux d'ouverture mais plaidé pour que le monde du travail ne soit pas "le seul à payer" la facture.
La plan de François Bayrou prévoyait un effort massif d'économies de 44 milliards d'euros pour le budget 2026. Son successeur a l'intention d'en faire un point de départ, avant de laisser les parlementaires l'amender.
I.Horak--TPP